Tous les coups de coeur de la rédaction

Festival

Primeurs de Massy

Rock — Du 26 au 29 octobre au Centre Paul B.

Les Primeurs fêtent leurs 19 ans ! Pour souffler les bougies, le directeur et cofondateur, Christian Maugein, nous ouvre les portes de ce festival futé, dédié aux jeunes artistes et aux premiers albums.

Quelle était l'idée de départ des Primeurs de Massy, festival inauguré en 1998 ?
En créant le festival avec Olivier Poubelle, cofondateur du festival, nous voulions proposer un événement qui permette une rencontre du public et de la nouvelle scène musicale. Il est toujours difficile - et ça l’était plus encore en 1998 pour des artistes n’ayant pas encore la reconnaissance du public - de proposer leur spectacle dans de bonnes conditions techniques et avec une audience suffisamment importante pour en permettre l’émulation. Par ailleurs nous avions aussi espoir que cela serve aussi de vitrine professionnelle, ce qui a été très vite le cas.

Pourquoi le choix de Massy, une cité-dortoir assez éloignée de Paris ?
Permettez-moi de vous contredire, mais Massy n’est absolument pas une cité-dortoir puisque la ville offre plus d’emplois que de personnes en âge de travailler ; de fait la majorité des Massicois travaille sur la zone d’emploi de sa commune. Pour ce qui est de l’éloignement, c’est à 30 minutes en transport en commun du cœur de Paris, ce qui n’est pas si loin. La vie ne s’arrête pas non plus au périphérique ! Il se trouve que je dirigeais Paul B, une scène spécialisée dans la musique, et quand nous avons proposé le projet des Primeurs à la municipalité, celle-ci nous a tout de suite accompagnés financièrement et logistiquement avec pour point de départ Paul B, qui, dès le début, fut l’écrin qui a accueilli le festival.

Dès le début, ce festival a joué les dénicheurs de jeunes talents. Pourquoi cette volonté de jouer les éclaireurs, un pari osé, et non de miser sur quelques têtes d'affiche, comme la plupart des festivals ?
Ça rejoint l’idée même du festival qui était, au départ, de pouvoir programmer quantité d’artistes que nous apprécions beaucoup, mais pour lesquels nous n’avions pas forcément le lieu, le moment et les moyens pour le faire dans de bonnes conditions. Par ailleurs, l’idée du premier album, c’est comme pour toutes les premières œuvres un instant très fort émotionnellement car les artistes y présentent des créations spontanées, faites de l’accumulation de toutes leurs émotions jusqu’alors contenues. Les albums suivants sont fatalement plus réfléchis et répondent à une nécessité de continuer le parcours artistique avec les tourments que cela procure, l’idée de mieux faire, la peur de décevoir…

Les Primeurs propose une programmation très éclectique, comment l'établissez-vous ?
A l’image de la salle Paul B, qui offre une programmation à l’année, le festival n’est pas construit autour de répertoire particulier. La condition première étant le premier album, nous n’excluons aucun genre artistique, ce n’est que lorsque nous avons sélectionné les artistes qui nous semblent les plus remarquables que nous bâtissons la programmation. Nous essayons alors de nous mettre à la place du public et de construire une programmation qui soit à la fois harmonieuse, pertinente, mais aussi faite de surprises, tout en évitant les entrechocs trop violents. Nous fuyons la linéarité, la diversité est voulue, encore faut-il qu’elle ne soit pas choquante, il n’y a rien de plus agréable qu’un public qui sort d’une salle surpris mais charmé.
 
L'édition 2016 semble se tourner vers des artistes un peu plus" installés", à l'image d'Acid Arab, Radio Elvis, Sages Comme Des Sauvages, Awa Ly ou The Angelcy... S'agit-il d'un changement de cap ?
Vous y allez un peu fort ! Passe encore pour Acid Arab et Radio Elvis, mais "l’installation" des trois autres me semble encore très précaires, même si j’espère pour eux que l’avenir confirme votre sentiment. C’est un peu le hasard, mais à de rares exceptions lors des éditions précédentes, il y a toujours eu des artistes qui avaient une audience naissante. C’est la thématique des premiers albums, notre point de départ, et nous n’allons pas nous interdire de programmer un artiste sous prétexte qu’il commence à acquérir un public. L’éclosion n’est pas identique pour tous, ce qui d’ailleurs ne présage rien du moyen ou long terme. L’an passé, au moment du festival, Mathieu Saïkaly paraissait avoir une notoriété naissante, Jain pas du tout, un an après la différence s’est inversée... Quand sera-t-il après leur deuxième album respectif ?

L'an dernier, vous avez lancé une "édition miroir" en organisant des Primeurs à Castres : pourquoi ce choix et allez-vous lancé d'autres petits frères des Primeurs ?
 Les raisons du choix de Castres sont assez simples : la ville peut être considérée comme un pendant régional de Massy, puisque de dimension plus petite, elle est à la périphérie d’une ville centre (Toulouse en l’occurrence), et on y joue aussi au rugby. Mais la raison la plus importante est qu’il y a là-bas la scène de musique actuelle "Lo Bolegason", un lieu similaire à Paul B, avec un directeur Olivier Nicaise et une équipe motivée et volontaire en laquelle nous avons toute confiance et de l’amitié à partager. Nous réfléchissons effectivement à d’autres possibilités sans vouloir une expansion démesurée ; deux autres points, à l’est et à l'ouest de la France par exemple, pourraient être pertinents.
 
Finissons sur quelques anecdotes. Quels sont vos plus beaux coups, les programmations les plus osées qui ont fait le buzz ?
Tryo dès la première année qui devient le phénomène que l’on connaît durant l’été précédent et qui signe son contrat discographique dans les loges du festival. Yael Naim en 2007, qui fait la une de tous les magazines et émissions de télé. Ghinzu en 2004 qui retourne le public. Une des affiches les plus osée sans doute, Guillaume Perret, un jazz pas toujours consensuel dans une soirée plutôt pop-électro.
 
Quel est l'artiste que vous réellement révélé ?
Je pense que personne ne peut réellement se prévaloir d’avoir révélé tel ou tel artiste, nous sommes des passeurs qui apportons notre contribution. Disons qu'aux Primeurs, on peut retirer une certaine satisfaction d’avoir programmé certains artistes alors inconnus comme Camille, Skip The Use ou, plus récemment, Rover et Faada Freddy.
 
Quel est le talent émergent que vous avez invité et qui n'a jamais transformé l'essai ?
En dix-huit ans, cela représente plus de 350 artistes, donc beaucoup n’ont pas connu la consécration, mais il me semble que la vie est très injuste pour Franck Monnet ou King Charles.
 
Le raté ?
The Dø dont la consécration est si rapide que l’année des Primeurs, ils sont déjà au Zénith !

Retrouvez toute la programmation sur paul-b.fr/les-primeurs-de-massy

—  Propos recueillis par Youri

Retour