"This is blues hip hop". C'est suffisamment rare pour être scandé comme une baseline - une punchline plutôt -, dans leurs refrains. Le blues hip hop ? Un voyage spatio-temporel, rien de moins, dans le XXème siècle, des années 20 aux nineties, du Mississippi à la côte Est américaine. Les shuffles de guitare se confondent aux boucles électro, une voix caverneuse dialogue avec le flow hip hop et les lézardes de scratch, questions-réponses entre un dobro du deep south et des tambours de bouche sur beat électronique... Les dinosaures du Delta blues breakdancent au fond de leurs tombes.
Depuis cinq ans, l'Epouvantail toulousain dépoussière les codes du blues, à la croisée des champs de coton et des jungles urbaines. Le guitariste-chanteur Slim Paul et le scratcheur Antibiotik Daw, épaulés par une section basse-baterie groove à souhait, dézinguent le "12 bar blues" et ses figures imposées (gammes pentatonique, structure harmonique en I-IV-V etc.). C'est sûr, cet épouvantail colle des fièvres aux puristes, mais ceux-ci, à force de trop regarder passer les trains - métaphore de la liberté et d'un avenir meilleur chers aux bluesmen -, ont raté le dernier tortillard depuis belle lurette. Après la sortie de leur album "Evil & Crossroads" (2013), Scarecrow revient avec un nouveau vinyle, "Left Behind". Les corbeaux n'ont pas fini de déchanter.